Haïti-observateur 3-11 juillet 2018
Par Rosie Bourget
Si en toute chose l’excès nuit, il n’en demeure pas moins que l’on peut aussi être fatigué de recevoir sans cesse de nos contacts WhatsApp, une quantité de messages conditionnés dans nos téléphones portables pouvant nous empêcher de bien démarrer la journée. Dans ces messages l’expéditeur lance un défi à l’utilisateur. Des fois, au réveil on lit: « renvoie-le-moi si j’en fais partie », partagez ce message à 10 personnes ou à tous ceux qui sont dans vos contacts pour les faire savoir que Dieu les aime, sinon un malheur va vous arriver », « j’ai fait ma part, j’espère que vous m’aiderez à le propager aussi. » « Si tu aimes Dieu, envoie ce message à d’autres personnes » « Si tu es fier d’être chrétien, partage » etc., en anglais « if you love God, send this message to other people » « if you’re proud to be Christian, share » « Do not delete this message until you send it to 10 people you want to succeed; to me as well if I am one of them. Amen. » C’est ce genre de phrases qui terminent les partages bibliques qui circulent sur WhatsApp et les réseaux sociaux.
Je ne sais pas si cela vous tente mais quant à moi, je ne me laisse pas toucher par cette vague de messages d’apparence anodine. Je ne fais pas mieux que de les supprimer et je passe à autre chose. Ne me dites pas que je suis la seule à en avoir marre de ce non-sens, de ces bons à rien qui se cachent derrière un téléphone portable pour perturber au quotidien la vie des autres ! Parmi ceux qui se lassent de cette pratique, je suis certaine que vous êtes du nombre même lorsque bon nombre de personnes semblent être convaincues par ce genre de démagogie qui circule sur WhatsApp. Puisque cet article tombe bien à pic, alors ensemble nous allons crever l’abcès.
Je ne suis ni pasteure, ni prophète, voire consacrée à un culte d’une divinité (prêtresse). Cependant, entant qu’auteure de développement personnel, je pense qu’il est de mon devoir de porter des éclaircissements sur cette mode ridicule et absurde qui envahit nos boîtes de réception et nos téléphones intelligents.
Depuis l’atterrissage de WhatsApp, tout le monde est devenu prophète en faisant suivre des chaines de prières et propageant des révélations par audio sur les réseaux sociaux, menaçant ou harcelant les gens qui sont dans leurs contacts. Depuis quand les utilisateurs de WhatsApp étaient des prophètes ? Avez-vous besoin de quelqu’un pour vous claironner que Dieu vous aime ? Connaissez-vous des représentants de Dieu sur WhatsApp ? Où étaient-ils avant le séisme de 12 janvier 2010 qui a mis Haïti au chaos? Pourquoi ils ne l’avaient pas prédit ou l’annoncé ? Dans quel chapitre de la bible dit-on : « si vous ne transmettez pas les messages (audio et texte) à 10 personnes ou bien, a tous vos contacts WhatsApp, vous serez puni ?» Cela m’amuse de constater comment ces prophètes peuvent être plus concernés du sort ou du bien-être des autres que ce qui se passe dans leur propre vie. Mon œil, quel privilège d’avoir dans nos contacts des gens qui se soucient de l’humanité ! Certes WhatsApp s’avère en quelque sorte, un outil très utile à ceux qui vivent à l’autre bout du monde. Par contre, il reste la pierre d’achoppement de beaucoup d’utilisateurs.
Etant donné que vous n’avez pas d’autres préoccupations que de harceler les gens sur WhatsApp, je vais vous prodiguer un sage conseil qui pourra vous servir de guide pratique, en vous expliquant comment vous pouvez vous mettre au service d’autrui. Dans des maisons de retraite, il y a toute une kyrielle de gens aux besoins spéciaux, jeunes comme vieux qui n’ont pas de famille pour leur rendre visite. Ce sont des personnes qui ont désespérément besoin de quelqu’un pour parler, pour les faire sentir qu’elles ne sont pas seules et abandonnées. Vous pouvez faire du bénévolat en vous mettant à leur disposition. Aussi, il y a d’autres qui sont touchées d’une maladie incurable, qui sont mourantes et qu’aucun médecin de la planète, aussi intelligent soit-il ne peur leur sauver la vie. Alors qu’il ne les reste que quelques jours à vivre, elles ont besoin de la prière avant d’aller se reposer éternellement dans leur dernière demeure. Puisque prêcher la parole de Dieu vous intéresse à ce point, puisque vous êtes disponible 24 heures par jour, cela ne peut pas vous déranger de les rendre visite au quotidien, considérant votre emploi du temps. Mais attention pour ne pas les extorquer avec vos messages conditionnés car elles sont déjà vulnérables.
En qui croyez-vous ? Savez-vous distinguer le bon grain de l’ivraie ?
Dans Mathieu 18 :19-20 (Louis Segond (LSG) ), il est écrit : « Je vous dis encore que, si deux d’entre vous s’accordent sur la terre pour demander une chose quelconque, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cieux. Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux.» Le Christ explique ici l’importance de prier à plusieurs pour une intention particulière, et n’impose aucune condition lorsqu’il invite ses disciples à se réunir en son nom. Lorsque nous souhaitons participer à une intention de prière, du Pape par exemple, libres à nous d’en choisir les modalités (lieu, moment, personnes…). Mais il convient de faire la différence entre s’unir par la prière pour une demande concrète et réelle (même entre personnes inconnues) et participer à une chaîne de prière.
Aujourd’hui, grâce à la technologie moderne, on assiste à de plus en plus de chaînes de prière et des révélations par audio qui, afin de parvenir à leurs fins, menacent ceux qui ne les suivent pas ou essaient d’imposer quelque chose. L’Église n’accepte pas que la prière soit ainsi instrumentalisée et dévalorisée. Ces chaînes de prière n’ont aucun sens pour deux raisons :
(1)- Elles garantissent le malheur à ceux qui ne la suivent pas, l’interrompent de manière temporaire ou définitive ou encore ne la transmettent pas. Pour cela, elles se servent de faux témoignages. Celui qui agit ainsi au nom de Dieu est un faux prophète et commet un péché grave. Personne ne peut formuler des menaces au nom de Dieu. Du coup, personne n’a le droit d’imposer sa doctrine à autrui au nom de Dieu.
(2)- Ces chaînes sont trompeuses car elles incitent à dénaturer et banaliser la prière. Et elles atteignent leur objectif en promettant aux participants un prétendu bénéfice personnel. Elles relèvent en fait de la superstition.
Imposer des conditions à la prière va à l’encontre des enseignements de l’Église. Ces pratiques sont réellement inefficaces. « Attacher à la seule matérialité des prières ou des signes sacramentels leur efficacité, en dehors des dispositions intérieures qu’ils exigent, c’est tomber dans la superstition » (Catéchisme de l’Église catholique 2111). Le problème de la superstition, c’est qu’elle pousse à faire confiance à des pratiques ridicules, offensant ainsi Dieu dans les moments de doute. Elle est contraire au premier commandement de Dieu et est le signe que la vraie foi n’existe pas. Là où décline la religion s’établit la superstition…à suivre
Maitrise en travail social